Lettres aux jeunes français, par Philippe Hayat
Posté le 30 octobre 2011
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Avez-vous remarqué comment on parle de vous ?
On devrait répéter chaque jour que vous êtes la principale ressource naturelle de notre pays. Mais pour les medias, pour la classe politique, vous êtes globalement un problème : condamnés au chômage pour un quart d’entre vous, à une absence inéluctable de retraite, à une incapacité totale d’intégration dans nos banlieues…
Vous êtes tellement à plaindre qu’il faut imaginer des « revenus contractualisés d’autonomie » pour accompagner votre entrée dans la vie active, qu’il faut contraindre par la loi les entreprises à augmenter le nombre d’apprentis, qu’il vous faut gommer sur le CV votre nom s’il ne « sonne pas convenablement », votre adresse, votre photo, votre spécificité…
Que dirait-on d’un parent qui élèverait son enfant en le plaignant chaque jour d’être ce qu’il est, et qui se pencherait à son chevet pour l’accabler de tous les maux en accusant la fatalité, la société, les marchés, la crise, les patrons ?
A force de vous ôter toute confiance en vous-mêmes, on risque de vous transformer en une génération d «indignés» pour reprendre un mot dans le vent.
Le problème avec les indignés, c’est leur propension à faire porter les responsabilités sur autrui, c’est le risque de s’en tenir à la protestation, surtout lorsqu’elle est collective, plutôt que d’envisager les moyens individuels de l’émancipation. Ceux qui vous encouragent à vous indigner vous entraînent dans la frustration, l’aigreur, puis la résignation. Ils feront de vous une jeunesse déjà vieille, qui défend son droit à la retraite à un âge où l’on devrait avoir envie de manger le monde.
Vous qui êtes riches de cette jeunesse, à l’indignation préférez la révolte, la vraie, celle qui mène à l’action pour contredire la fatalité. Puisque la vie professionnelle semble si difficile à tracer, prenez-la en main, ne laissez pas les autres la choisir à votre place. Devenez entrepreneur et accomplissez-vous. Partez de votre envie, de votre talent, concevez votre projet et portez-le. Construisez-le dans votre propre entreprise ou dans celle d’un autre, dans une association ou en profession libérale, le tout est d’en rester le moteur et le responsable, d’en mesurer directement les résultats et d’en retirer la satisfaction et les bénéfices qui vont avec. Tant que l’envie demeure, le succès viendra toujours, même après bien des détours. Vous grandirez à chaque obstacle surmonté, vous vous densifierez après chaque petite victoire. Vous « persévèrerez dans votre être » comme le disait Spinoza.
C’est alors que vous construirez bien plus qu’une vie professionnelle, vous apporterez du sens à votre vie. Voilà une révolte qui vaut la peine d’être menée. Le philosophe ajoute : « et vous ne penserez à rien moins qu’à la mort ».
Entreprendre, c’est finalement agir pour se sentir vivant. C’est persister dans sa jeunesse et reculer l’âge des renoncements. Entreprendre, c’est faire fructifier le présent, avant de se retirer le moment venu, le plus tard possible, comme un convive rassasié.
Philippe Hayat, Fondateur de 100 000 entrepreneurs – Octobre 2011